Pédagogie

Story-boarder : un métier-passion qui se transmet !

#passion créative

Les campus d’e-artsup regorgent de professionnels de haute volée. Le campus d’e-artsup Strasbourg ne fait pas exception. Ainsi Romain Sordet, qui enseigne le story-board d’animation, a réalisé un passage par le jeu vidéo et l’animation. Et il se distingue aujourd’hui avec sa bande dessinée Téléportation Inc publiée chez Drakoo. Rencontre avec un passionné qui donne corps à ses rêves. Et qui partage son enthousiasme avec ses étudiants !

Qui es-tu et qu’enseignes-tu à l’école e-artsup ?
Je m’appelle Romain Sordet, je suis story-boarder et dessinateur de BD. J’enseigne le story-board d’animation et, de manière plus large, le dessin narratif.

Quelle a été ta formation ?
J’ai une formation d’arts appliqués en design industriel, puis j’ai fait une école de dessin animé à Nantes.

En animation, quels postes as-tu occupé et sur quels projets ?
J’ai débuté par du design de props (accessoires) sur Les Sauvenatures puis sur la saison 1 de Zig et Sharko à la fin des années 2000. J’ai ensuite été formé au story-board sur la saison 2 de Gawayn. Poste que j’ai depuis occupé sur de nombreuses séries dont les plus connues sont Les Lapins Crétins, Zak Storm, Super4, Arthur et les Minimoys et dernièrement Batwheels.


Parle-nous de ton univers, de tes références, de ce qui te plait et pourquoi ?
Je suis un enfant des années 80, j’ai donc été bercé par la japanimation et les mangas cyberpunks.
J’étais surtout attiré par les univers et les graphismes très marqués. Puis j’ai découvert les comics. Je suis aujourd’hui plus influencé par le cinéma de manière générale, et la science-fiction en particulier, car je trouve le processus créatif très intéressant :  un grand nombre de savoir-faire sont mobilisés pour faire aboutir une vision. Je trouve cela très inspirant.

Focus sur Téléportation ! Raconte-nous comment est né ce projet, comment vous avez travaillé ? Quel a été le plus gros défi à relever ?
À l’époque, quand je travaillais sur mes projets de BD, j’avais l’habitude de streamer mes séances de dessins sur Twitch où un auteur établi a fini par me repérer. Il m’a donné le contact de Christophe Arleston qui cherchait de jeunes auteurs pour lancer sa nouvelle maison d’édition Drakoo. Mon dessin a plu et Christophe Arleston m’a donc proposé ce projet qu’il avait dans ses cartons et qui était scénarisé par Dominique Latil. Après avoir lu le pitch, j’ai été emballé et j’ai tout de suite accepté.

J’ai d’abord dépouillé le script sous la forme d’un storyboard très simple avec des dessins patates que moi seul peut déchiffrer. J’ai ensuite créé une version sketch de chaque planche où tout doit être en place, perspectives, personnages, expressions et attitudes, placement des bulles, etc. Une fois cette mise en scène validée, il n’y a plus qu’à passer à la mise en forme et au dessin en lui-même, d’abord une passe de crayonné puis encrage pour le rendu final. Le storyboard reste l’étape créative centrale pour moi, même en BD : c’est l’étape où l’on prend toutes les décisions créatives pour pouvoir ensuite se concentrer pleinement sur le côté esthétique du dessin. Ensuite, on envoie les planches à Aurélie Kaori, ma coloriste.

Ce que j’ai trouvé le plus difficile, en dehors de la mise en place de l’univers assez dense, c’était de réussir à maintenir le look et le jeu des personnages constants sur la durée des trois albums. Notre dessin évolue au fur et à mesure et il faut réussir à ce que les personnages restent reconnaissables et identiques du début à la fin ; je pense que mon expérience de story-boarder m’a beaucoup aidé sur ce point.

Quel projet BD rêves-tu de sortir, quelle collaboration tu rêverais de vivre ?
Pour les projets BD, je travaille actuellement sur un nouvel album pour Drakoo où je fais le dessin, mais également la couleur, ce qui est pour moi un grand saut dans l’inconnu. Je souhaiterais ensuite, si cela est possible, produire un album écrit et entièrement dessiné de manière traditionnelle. À l’heure de l’IA, je trouve que cela aurait du sens pour nous, artistes, de redonner de la matérialité à notre travail. Je m’exerce actuellement en ce sens. Enfin, mon rêve de gosse était de bosser pour les Américains sur des comics de super héros, mais, vu le rythme de travail là-bas et le peu de temps que j’ai déjà avec toutes mes activités, peut-être est-il aussi bien que cela reste un rêve…

Comment transmets-tu ce savoir-faire en mise en scène à tes étudiants ?
Je commence mes cours de façon assez ludique en faisant faire beaucoup de dessins papiers, en essayant d’amener les étudiants à réfléchir à comment faire jouer leurs personnages, où les placer dans le décor et pourquoi. Il est important, avant de vouloir raconter des histoires en images, d’avoir des fondamentaux de dessin. On passe ensuite à un côté plus technique du cours avec des notions de valeurs de plan et d’angles de vue, de cadrages et de compositions.

Je mets particulièrement l’accent sur la nécessité de raconter une histoire de façon claire et fluide, en évitant notamment au maximum les faux raccords. On termine avec l’apprentissage du logiciel utilisé par tous les story-boarders actuellement, Toonboom !

La difficulté avec le story-board est qu’il s’agit de la réalisation d’un document aussi bien technique qu’artistique. Il faut donc réussir à transmettre des concepts parfois très techniques de manière assez ludique pour ne pas perdre les étudiants, tout en encourageant leur créativité et leur développement personnel. C’est un défi intéressant !